
Le crétacé précoce dans son ADN
La première abeille voit le jour entre – 145 et – 65 Millions d’années (un fossile d’une abeille serait daté d’environ 100 Millions d’années) .
D’après l’analyse phylogénomique d’Apoïda ( Analyse phylogénomique) concernant la recherche de l’origine du corps d’abeilles, du 18 mai 2018, l’âge estimé de son origine est de 128 Millions d’années durant la période du crétacé précoce, descendant d’une guêpe apoïde de la famille Crabonidés de la sous-tribu Ammoplanina (voir la nomenclature des insectes), date à laquelle la famille des Angiospermes (sous – embranchement des végétaux) s’est développée de manière exponentielle. le régime alimentaire de ces guêpes a évolué passant de carnivores à celui de pollinivores. Au fil des millions d’années, des bouleversements climatiques, quatre groupes d’espèces du genre Apis apparaissent entre 6 à 9 Millions d’années dont Apis mellifera.
Depuis 1992, les scientifiques ont reconnu grâce aux critères morphologiques, quatre grandes lignées (sous-espèces).
- A: lignée Africaine
- O: lignée Occidentale (Caucase, Turquie, Moyen-Orient, Chypre, Crête)
- C: lignée de l’Europe Centrale et de l’Europe de l’Est
- M: lignée de l’Europe de l’Ouest et Scandinavie
Deux nouvelles lignées ont pu être récemment découvertes.
- Y: lignée Ethiopienne
- S ou Y: lignée Proche Orient (Syrie)
Les sous-espèces d’Apis mellifera se seraient différenciées entre -1,3 et -0,7 Millions d’années. L’ADN mitochondrial permet de suivre les filiations maternelles de la reine. Ce composant cellulaire indique que l’abeille noire (Apis mellifera mellifera) fait partie de la lignée M. L’abeille noire a colonisé l’Europe de l’Ouest et la Scandinavie depuis environ 1 Million d’années.
Des caractéristiques morphologiques uniques
L’abeille noire comme son nom l’indique est de couleur sombre à brun foncé , plus grande et surtout plus large que toutes les autres abeilles, ces deux caractéristiques lui permettent d’absorber plus de chaleur et donc de sortir à des températures plus basses (6/7°C ensoleillé et sans vent).
Beaucoup plus velue, l’abeille noire a une pilosité plus longue (cela varie de 0,40 à 0,50 mm, parfois entre 0,60 à 0,70 mm pour le Nord de l’Allemagne à la Scandinavie, une morphologie qui permet de polliniser beaucoup plus facilement l’ensemble du règne végétal (que ce soit dans les milieux sauvages ou agricoles).
La longueur de sa langue est très courte par rapport à la taille de son corps, en sachant que plus on se dirige vers le Sud, plus celle-ci est grande (moyenne norvégienne 5,90-6,10 mm, moyenne française 6,15 -6,45 mm).

Une abeille endémique à protéger
Jusqu’à la seconde moitié du XXème siècle, l’abeille noire a été utilisée pour la production de miel, ensuite les apiculteurs ont délaissé celle-ci pour des sous-espèces aux rendements importants comme l’abeille Italienne (Apis mellifera ligustica), plus tard l’abeille Caucasienne (Apis mellifera caucasica), et ensuite l’abeille Buckfast qui a été créée avec de multiples croisements par le frère ADAM de l’Abbaye Buckfast en Angleterre.
Sur le long terme avec la multitude d’espèces, le croisement naturel avec des abeilles moins autonomes et s’adaptant moins facilement aux changements climatiques rapide fait perdre le code génétique unique de l’abeille noire.
Au fil du temps, l’abeille noire est considérée comme agressive, une interprétation erronée encore soutenue aujourd’hui, or c’est l’hybridation qui la rend agressive. Bon nombre d’apiculteurs travaillant à ses côtés peuvent le confirmer. Par ailleurs, les scientifiques ont démontré que ce sont les abeilles noires hybridées à des abeilles importées qui sont agressives.
Contrairement aux autres abeilles , l’Apis mellifera mellifera est une bonne gestionnaire de ses ressources, en plus de pouvoir sortir à des températures plus basses. Elle a des capacités d’adaptation plus efficaces, grâce à la mémoire de son ADN qui lui a permis de s’adapter rapidement au climat en ayant survécu à deux périodes glacières. Au vu des transformations météorologiques qui, comme nous pouvons le constater évoluent en dents de scie de manière régulière et plus violente, cette caractéristique génétique lui confère une plus grande résistance et un avantage certain face aux changements climatiques et floristiques.
Économiquement, l’abeille noire est moins onéreuse par sa résistance et sa longévité, elle demande moins d’entretien et la production de miel est plus constante.
Comment protéger l'abeille endémique
- Installer des conservatoires d’abeilles noires. Une zone doit être définie au sein de laquelle les essaims sont préservés.
- En favorisant des pratiques apicoles respectant sa nature sauvage.
- En travaillant aux côtés des agriculteurs pour accélérer la transition agricole qui favorise la biodiversité, celle-ci fait partie intégrante de notre équilibre.
Ressources littéraires
- « Note sur le miel eucalypté naturel sécrété par les abeilles noires de Tasmanie (Australasie) », aux Éditions Hachette Bnf, par le Dr CH. Thomas-Caraman, note lue à l’Académie de médecine le 25 janvier 1887 (date de l’édition originale 1887).
- « La vallée de l’abeille noire » de Yves ELIE, aux éditions Actes Sud, l’auteur retrace les moments clefs de ce projet dans les cévennes.
- « Hérédité chez l’abeille et les colonies d’abeilles » de Bernard SAUVAGER, aux éditions Anerca. Résumé du livre: Après un rappel de quelques notions de génétique et une introduction à l’épigénétique afin de comprendre comment se transmettent et s’expriment les caractères d’un individu, nous essayerons de voir comment les caractères du super organisme que constitue une colonie, peuvent se transmettre à une autre colonie. Le rôle primordial de la polyandrie sera ensuite abordé, avec les conséquences sur les fécondations contrôlées ou instrumentales. Enfin, pour les éleveurs désirant intégrer ou fixer des caractères désirés dans une lignée par l’insémination, certains modes d’élevages en consanguinité seront décrits.
Auteur de l’article :
Romaric PELOU
Membre CA GDSA35
Référent frelon à pattes jaune GDS Bretagne